Un livre dans ma valise Asie,Lecteur ado « Ne tombe jamais » : être un enfant au Cambodge en 1975

« Ne tombe jamais » : être un enfant au Cambodge en 1975


Ne tombe jamais - Battambang - Cambodge

Survivre. Survivre à tout. Tel est le fil conducteur de ce témoignage poignant d’un jeune Cambodgien rescapé de la barbarie des Khmers rouges. Il faut un coeur solide pour découvrir, page après page, l’horreur puis la délivrance.

Ne tombe pas - CambodgeJe vous le dis tout de suite, « Ne tombe jamais » de Patricia Mc Cormick (Gallimard – Scripto) va vous retourner. En le débutant je n’étais pas certaine de pouvoir me confronter au quotidien de Arn, enfant de 11 ans quand les Khmers débarquent dans sa vie. Conseillé à partir de 15 ans par l’éditeur, il me semble qu’une première approche historique préalable est nécessaire avant d’entamer la lecture.

Pour un voyage au Cambodge avec un ado, je me verrais plutôt lui expliquer le conflit en évoquant le témoignage de Arn, plutôt qu’en lui proposant sa lecture directement.

Patricia Mc Cormick a rencontré Arn qui a survécu à toutes les atrocités possibles et s’est reconstruit dans la famille d’un révérend américain. Ce révérend a recueilli au total 18 enfants cambodgiens.

Patricia Mc Cormick a passé des heures à l’écouter, le questionner, à entendre l’inaudible et l’inacceptable. Elle s’est aussi rendu plusieurs fois au Cambodge. Au bout de 2 ans, elle s’est mise à l’écriture de ce témoignage, quelque peu romancé quand la mémoire de Arn faisait défaut. Elle s’est toujours appuyée sur des éléments historiques vérifiés pour rédiger son récit. Utilisant volontairement des tournures maladroites pour coller au mieux au ressenti du jeune garçon, elle se fait porte parole d’Arn mais aussi de tous ceux qui ont disparu.

Ainsi, par la plume de Patricia Mc Cormick, Arn, 11 ans en 1975, décrit son quotidien dans l’enfer des Khmers rouges durant 4 ans. Après les pénibles travaux dans les rizières, il intègre l’orchestre d’enfants à la gloire des Khmers le jour… et pousse des cadavres dans une fosse la nuit. Puis arrive enfin le temps de la libération et le départ aux Etats-Unis. Autant vous le dire : on est horrifiés par ce qu’il a vécu / ce qu’ils ont vécu… et on pleure de rage et d’impuissance.

Extrait : « New York 1984. Un grand discours que je fais. Mon propre discours, pas celui préparé par Peter. (…) Je commence très lentement, en faisant bien attention. Je parle un peu de ma vie avant les Khmers rouges, quand je dansais le twist avec mon frère, quand j’allais à la chasse aux grenouilles avec Hong.(…) Et puis l’histoire sort de moi, elle se déverse, les enfants qui meurent de faim, la hache qui frappe les crânes, les gens qui crient vers moi du fond de la tombe.Et alors, quelque chose se passe. Le papier que je tiens, il est tout mouillé, les mots maintenant dégoulinent de la page. Et ma voix, ma voix que j’essaye de rendre bien américaine, elle se déchire, elle se brise et meurt dans ma gorge. Jamais je n’avais pleuré, pas une seule fois, pendant toutes ces années. Depuis l’enfant de 11 ans jusqu’à maintenant, pas une seule larme. Pendant tant d’années, je pense que j’ai tué toutes les larmes en moi. Mais après cette longue sécheresse, maintenant enfin arrive la pluie. »

Et qu’est devenu Arn, me direz-vous ? Il s’est reconstruit et s’est consacré à des causes humanitaires. Représentant d’Amnisty International, il a cofondé l’organisation Children of war. Il est retourné plusieurs fois au Cambodge, et à retrouver sur ces terres natales quelques uns de ses compagnons. Aux Etats-Unis, il a également retrouvé 2 de ses soeurs survivantes après de longues années de recherche.

Sandrine Damie

2 thoughts on “« Ne tombe jamais » : être un enfant au Cambodge en 1975”

  1. J’ai lu Sothik il y a un an, avant de savoir que je découvrirai le Cambodge cette année. C’est une version bien plus « facile » à lire pour une première approche. Je crois que « Ne tombe jamais » est un témoignage trop lourd pour moi, je verserai bien trop de larmes pour arriver au bout de ma lecture.

    1. Merci pour ton retour de lecture ! J’ai effectivement beaucoup pleuré à la lecture de ce livre ! Je vais proposer la semaine prochaine une sélection de livres autour du Cambodge et ces 2 titres vont y figurer pour les ados. Bon dimanche, Sandrine

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