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Etats-Unis : comment est née Yehunda ?


Yehunda d'Isabelle Wlodarczyk

Yehunda est la dernière héroïne née de l’imagination d’Isabelle Wlodarczyk avec la complicité de l’illustrateur Dani Torrent. Retour sur le parcours d’auteure d’Isabelle Wlodarczyk et sur son travail d’écriture.

Comment passe-t-on d’études en philosophie et en russe au métier d’auteure ?
Avec un grain de folie ? Plus sérieusement, c’est la même curiosité qui m’a motivée à apprendre le russe, à farfouiller dans l’histoire de la pensée et à écrire pour les enfants. Ce que j’aime dans mon nouveau métier, c’est justement de pouvoir me documenter sur des domaines très différents, continuer à apprendre des mots, à découvrir le monde…et tout cela, avec une légèreté enfantine ! (D’ailleurs récemment, j’ai traduit pour les éditions Lirabelle une comptine russe…comme quoi le russe mène à l’édition jeunesse !)

Vous avez écrit une vingtaine de livres jeunesse aussi bien des documentaires que des albums ou des romans. Dans quel format vous sentez-vous le plus à l’aise ?
J’aime les trois formats. Avec le documentaire, je passe des mois à me renseigner sur un sujet. Souvent, j’y puise des éléments pour de futurs romans ou albums. Par exemple, le fait de travailler longtemps sur Molière et Descartes a donné naissance à Panique sur la Banquise (roman paru chez Oskar). L’histoire d’un mammouth qui se réveille au Grand siècle. Mon documentaire sur les chevaliers, Des histoires de chevaliers pour réfléchir a donné naissance à Lancelot (Les grands textes à hauteur d’enfant) chez Amaterra, alors que L’Odyssée pour réfléchir (Oskar) a nourri Pénélope (Amaterra).

Coeur de hibou - Rue du mondeJe passe étonnamment moins de temps sur le texte d’un roman que sur celui d’un album. Je suis bavarde et l’espace du roman est plus conforme à ma logorrhée ! Cela dit, j’aime le travail poétique dans l’écriture du texte d’album.

L’écriture du texte d’album est un exercice périlleux : il faut écrire en complément d’illustrations qui n’existent pas encore. C’est presque un texte à trous, des interstices dans lesquels l’illustrateur s’insère. C’est tout le paradoxe de l’album : on l’écrit seul pour deux, et l’illustrateur fait naître un tiers… De ce point de vue, Cœur de hibou (Rue du monde) a été pour moi un vrai bonheur. Anne-Lise Boutin a donné naissance au texte, par ses illustrations, comme j’espère avoir nourri ses illustrations par le texte. 

Plusieurs de vos ouvrages – l’Allée du bout du monde ! (éditions Philomèle), L’arbre aux fruits amers (Oskar Editions), Lancelot du Lac (Amaterra), Geneviève De Gaulle (Oskar Editions), Surtout ne prends pas froid (Oskar Editions) – se déroulent durant des périodes historiques charnières. Avez-vous un goût particulier pour l’Histoire ?
A l’école, je détestais l’Histoire, alors que ma sœur et ma meilleure amie nourrissaient une passion dévorante pour cette matière. Je n’en voyais pas l’intérêt, j’apprenais bêtement mes leçons en m’ennuyant à mourir ! Il a fallu que je comprenne que l’Histoire n’était pas une succession de faits, mais l’occasion de raconter des histoires et celle de réfléchir sur le monde pour que cela me passionne à mon tour. Je travaille pas mal sur commande pour la collection Histoire et société chez Oskar. C’est l’occasion de découvrir des trajectoires, des vies hors du commun. Je ne choisis pas forcément les périodes sur lesquelles j’écris. Mais ma période de prédilection, c’est le dix-septième siècle, avec ses histoires de filous, de bourreaux et de bateleurs. C’est une source inépuisable d’inspiration. L’allée du bout du monde (Philomèle) et La Petite disparue (Oskar) sont écrits dans cet esprit-là.

Qu’est-ce qui vous inspire pour vous lancer dans l’écriture ?
Pour les biographies, ce sont les destins exceptionnels. Pour le reste de mes ouvrages, ce sont les mots, un peu désuets, bien souvent, des mots disparus. Un exemple : au dix-septième siècle, l’expression une reine d’Antioche désignait une reine sans royaume…n’est-ce pas un terreau incroyable pour écrire une histoire ?

Yehunda d'Isabelle WlodarczykYehunda, votre dernier album (sorti le 10 octobre 2015 aux Editions d’Orbestier), se situe en Amérique. Comment est née cette collaboration avec l’éditeur ?
C’est un album autour de l’esclavage. Il raconte l’histoire d’une petite fille dans les champs de coton. Le livre se déroule aux Etats-Unis. J’ai emprunté le titre à une chanson de Nina Simone : Four women. L’une de ces quatre femmes se nomme Yehunda. Je voulais raconter son histoire, même, si forcément cela est symbolique, car elle ne vit pas à l’époque de Nina Simone ! J’avais déjà travaillé avec cet éditeur. J’étais très heureuse de notre livre précédent : Célestin rêve. J’ai trouvé l’objet livre très abouti, un petit format vraiment optimisé. J’apprécie les choix éditoriaux de cette maison et j’ai donc décidé de lui confier ce texte qui pouvait s’inscrire dans sa ligne éditoriale.

Pouvez-vous nous présenter brièvement cet album ?
L’album est grand. Les illustrations de Daniel Torrent sont impressionnantes. Elles sont très colorées, très vives, pleines de douceur alors que le texte traite d’un sujet sensible. Il s’en dégage une réelle harmonie. On perçoit le soleil écrasant des états du sud, par la forte luminosité, au fil des pages.

Le texte raconte l’histoire d’une petite fille qui est amoureuse d’un Blanc, le fils du maître de la plantation. Forcément, leur histoire d’amour est contrariée. Mais on est libres de faire des miracles dans les livres !

Pouvez-vous nous parler de Dani Torrent, l’illustrateur, et de votre travail en duo sur cet album ?
Son travail est superbe. J’ai aperçu ses illustrations pour la première fois sur les réseaux sociaux et j’ai songé que son univers correspondait à Yehunda. L’éditeur l’a contacté et il a accepté de travailler sur ce texte. J’ai découvert ses illustrations tout à la fin. Je suis ravie du résultat !

Il s’agit d’un album grand format. Comment ce choix s’est-il fait ?
C’est l’éditeur qui a fait ce choix et je l’en remercie vivement. Le format laissera une plus grande place aux illustrations. Il a pensé que l’histoire s’y prêtait de par les couleurs et les contrastes qu’elle suggérait.

Propos recueillis par Sandrine Damie (octobre 2015)

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