Avec le roman « Elsa », Angela Bubba raconte la trajectoire d’Elsa Morante, figure majeure de la littérature italienne du 20e siècle, à travers une mosaïque de scènes et de dialogues plutôt qu’une narration linéaire classique.
La carrière littéraire d’Elsa Morante
Avant de découvrir le roman d’Angela Bubba, je n’avais jamais entendu parler de cette autrice italienne (et vous ?). Au fur et à mesure de ma lecture, j’ai fait des pauses pour croiser le récit fictionnel et des éléments biographiques plus classiques.
Elle publie son premier recueil de nouvelles, Il gioco segreto, en 1941. Son roman Mensonge et sortilège (1948) reçoit le prix Viareggio, puis L’Île d’Arturo (1957) fait d’elle la première femme lauréate du prestigieux prix Strega.
Après un long silence, elle publie en 1974 La Storia, vaste fresque historique et sociale qui devient un best-seller international et suscite une vive polémique en Italie. Son dernier roman, Aracoeli (1982), couronné en France par le prix Médicis étranger en 1984, confirme l’importance de son œuvre, marquée par l’histoire, l’enfance et les destins brisés.
Côté vie privée, elle épouse l’écrivain Alberto Moravia en 1941. Leur union rassemble deux figures majeures de la littérature italienne. Pendant la Seconde Guerre mondiale, ils sont contraints à l’exil dans le Latium (1943-1944), une épreuve qui marque l’autrice.
Après la guerre, leur maison romaine devient un centre intellectuel fréquenté par des amis comme Luchino Visconti et, surtout, Pier Paolo Pasolini, qui devient un confident pour elle. Le couple se sépare en 1962 (divorce officiel en 1975).
Fragilisée par des problèmes de santé et une tentative de suicide en 1983, Elsa Morante meurt à Rome le 25 novembre 1985.
« Elsa » d’Angela Bubba : le portrait d’une artiste intransigeante
Loin d’une biographie classique avec du recul sur la personne mise en lumière, l’autrice a choisi de romancer la vie d’Elsa Morante pour nous permettre d’être au plus près de ses émotions et de ses choix. Son œuvre littéraire n’est d’ailleurs pas le fil conducteur du récit, mais plutôt ses rencontres.
Elle révèle ainsi le tempérament d’une femme hors norme. Angela Bubba réussit à faire sentir cette force créatrice brute, cette détermination qui caractérisera toute l’existence d’Elsa Morante.
L’auteure ne cède jamais à l’hagiographie facile. Son Elsa n’est pas un personnage vraiment attachant. Une certaine froideur se dégage d’elle, avec un pessimisme latent qui traverse les pages. On devine, derrière les dialogues, une femme qui ne transige pas avec son art, quitte à se rendre difficile d’approche.
Dans le roman, la figure d’Arturo (un fils imaginaire) symbolise une maternité avortée et inassouvie qui hante Morante, jusqu’à devenir une présence récurrente dans son œuvre.
Au final, la lecture de cette biographie romancée est une invitation à aller lire Elsa Morante. J’ai repéré ses livres au format poche chez Folio.

Bonne lecture
Sandrine Damie
« Elsa » d’Angela Bubba
Éditions Héloïse D’Ormesson
Grand format : 22 euros, format numérique : 6,99 euros




